L’accueil en terre Sainte est assuré par les moines franciscains. Ils ont la garde de quelques lieux saints, le saint-sépulcre, le mont Sion, la grotte de la nativité à Bethléem. Ils sont les seuls autorisés par le sultan à diriger les visites sous forme de marches processionnelles sur les traces du Christ. Pour obtenir le sauf-conduit indispensable pour se rendre dans la ville sainte, chaque pèlerin doit s’acquitter du paiement d’une taxe. L’attente avant l’obtention du visa dure parfois une semaine, dans des conditions proches de l’emprisonnement. Dans cet extrait, Breydenbach livre un aperçu des conditions : " la coutume est telle aux Sarrasins de venir dans la caverne aux pèlerins , et de les appeler pour leur demander leur nom et prénom. Puis ils les enferment tant que le montant du sauf-conduit n’a pas été accepté (…) "
La route entre Jaffa et Jérusalem s’effectue à dos d’ânes. Là encore, la location d’ânes ou de chameaux est coûteuse. Mais au bout de quelques jours, les pèlerins sont récompensés devant le spectacle de Jérusalem. Il peut paraître étonnant que l’ouvrage de Breydenbach ne présente pas de vue panoramique de la ville sainte. Seul le Saint-Sépulcre est reproduit sur une gravure. Il n’insiste pas plus dans ses textes sur sa piété religieuse.
Pourtant, il est
prêt à risquer sa vie dans le désert pour se rendre sur le mont Sinaï. L’aventure
coûteuse et risquée nécessite le recours à un guide interprète. Breydenbach
y perd momentanément la vue et la raison. Il fait halte au couvent de sainte
Catherine au pied de la montagne.
Par contre, l’auteur allemand fait preuve d’un intérêt particulier pour les peuples qu’il rencontre. Les costumes permettent d’identifier les communautés. Sarrasins (document 10), cavaliers turcs (document 11), paysans syriens (document 12), banquiers juifs (document 13), Chrétiens d’Orient Grecs (document 14) sont gravés avec un souci particulier du détail. Chaque gravure est accompagnée d’un tableau qui reproduit les écritures des différents peuples (documents 15 et 16). Breydenbach ne semble pas avoir eu de réels contacts avec les populations locales. Il note l’hostilité des Musulmans, notamment les insultes reçues dans les environs de la ville de Ramleh, entre Jaffa et Jérusalem. Ce qui peut se comprendre aisément après trois siècles de croisades et de conflit entre les communautés religieuses. Mais les communautés de chrétiens d’Orient ne semblent pas plus amicales.
Les représentations d’animaux alimentent la vision exotique de ce voyage, sans autre souci scientifique, présentant girafe, chameau ou chèvre à côté d’une licorne et d’un singe à la posture humaine dont il ne précise pas le nom (document 17).
Ces récits de voyage de la fin du Moyen âge s’inscrivent dans une époque d’ouverture de l’Occident chrétien. Ils démontrent un goût pour le dépaysement et l’exotisme. Ils visent aussi à définir un modèle de vie chrétienne en fréquentant les lieux parcourus par le Christ. Ils sont aussi indissociables de l’idée de croisade, encore présente dans les esprits.
Leur diffusion, favorisée par l’imprimerie, ouvre aussi la voie à d’autres aventures maritimes qui ne seront plus exclusivement méditerranéennes. Les voyages de découverte du XVIe siècle complèteront et renouvelleront le genre des récits de voyage vers des horizons plus lointains.