Les traités de recettes

Dès l’antiquité, des documents attestent l’existence d’une transmission écrite concernant la peinture. Les plus célèbres sont  l’histoire naturelle de Pline ou encore le Papyrus de Leyde au début du IVe siècle. Tout au long du Moyen Age, des auteurs complètent ce savoir. Les deux grands formulaires de l’époque romane sont les traités d’Héraclius et la Schedula de Théophile. A la fin du XIVe siècle, Le livre de l’art de Cennino Cennini  donne des recettes qui seront appliquées par les enlumineurs et les peintres de la fin du Moyen Age et de la Renaissance.

Quelques rappels de prudence sont indispensables quand on veut s’inspirer des recettes anciennes.

- Ces ouvrages ne sont pas des recueils sur la technique de la peinture proprement dite. La plupart des manuels médiévaux consistent en alignements de formules de métallurgie, de teinture, d’alchimie, de médicaments …

 - Ces auteurs donnent des indications de temps, de mesure, de poids qui ne sont plus appliquées aujourd'hui et sont donc difficilement traduisibles. En voici quelques exemples:
        
- l'imprécision quant au temps :

" … laissez bouillir lentement et doucement le temps de dire le miserere mei Deus une fois " : manuscrit de Jehan Le Bègue.
        
- l’imprécision quant aux volumes et poids ( confusion jusqu’à l'adoption du système métrique pendant la période révolutionnaire) : 
" prenez deux pintes d’eau de pluie, trois onces de vif argent et deux onces de chaux vive " : manuscrit de Jehan Le Bègue.
 " … ajoutez résine, un morceau égal à cinq noix " ou " … et un morceau environ trois fois aussi grand qu’une fève " : manuscrit de Bologne.
       
 - l'imprécision quant à la longueur du temps de préparation : par exemple, la fabrication de l’huile de lin suivant la recette du moine Théophile :
" prenez de la graine de lin que vous sécherez dans une poêle, sur le feu, sans eau ; mettez-la dans un mortier et triturez-la avec le pilon en poudre très fine ; puis la remettant dans la poêle et versant un peu d’eau, vous ferez chauffer fortement. Après cela, enveloppez-la dans un linge neuf, placez-la dans un pressoir dans lequel on extrait habituellement l’huile d’olive, de noix ou de pavot ; et exprimez de la même manière l’huile de lin. Broyez-la avant de la purifier en la faisant bouillir avec de l’eau en la chauffant avec des croûtes de pain, de la sciure de bois, du sable ou d’autres matières bizarres. " (Des liants et des couleurs, Jean Petit, EREC, 1995. Médiathèque de l'Agglomération troyenne, Art 751.2 PETI).
 "Les difficultés liées à la terminologie qui varie selon les régions et les siècles, les termes intraduisibles, les imprécisions dûes aux recommandations de silence et de secret pendant tout le Moyen Age, compliquent encore la tâche de ceux qui essaient de dévoiler les mystères de l’enluminure médiévale". (Les Alchimistes grecs, Robert Halleux, Paris, les Belles Lettres, 1981).

Pour en savoir plus :

- THÉOPHILE, prêtre et moine ; Charles de L'ESCALOPIER, Essai sur divers arts, Paris, 1843 
/ Théophilus, édition 2000. ( Médiathèque de l'Agglomération troyenne,  f.7 2904).

 - Les Alchimistes grecs, tome 1: Papyrus de Leyde et papyrus de Stockholm, texte établi et traduit par Robert Halleux, Paris, les Belles Lettres, 1981 (collection des universités de France). (Médiathèque de l'Agglomération troyenne, 0603-4).

 - CENNINO CENNINI, Il libro dell 'arte Paris, Berger Levrault, 1991. Médiathèque de l'Agglomération troyenne, Art 759.02 CENN).

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