ATIENT TRAVAIL DU COPISTE

Dès le VIe siècle, la règle de Saint Benoît organise les activités quotidiennes des moines. Les monastères sont des foyers de vie spirituelle, des centres de production agricole mais aussi des lieux de conservation et de copie des manuscrits. Les étapes de la copie. Avant d’entamer son patient travail d’écriture, le copiste doit préparer sa page blanche en réalisant la justification. Il trace une ou plus souvent deux colonnes. Il délimite des marges destinées à recevoir un commentaire ou glose,  plus grande taille pour les lettres ou les miniatures, et indique par une « lettre d’attente » la lettre qui devra y être dessinée. A l’aide d’une roulette à clous ou d’un compas lui permettant de conserver un écart constant, il réalise la réglure ; il perce le parchemin de petits trous, avant de relier ces repères par un trait horizontal à la pointe de plomb (manuscrit 40). Pour travailler, les moines sont réunis dans un atelier de copie, le scriptorium. Ils écrivent sur des pupitres inclinés. Ils ont pour matériel un encrier, pot en corne ou en argile, un calame de roseau ou plus souvent une plume d’oie, taillée à l’aide d’un canif, enfin un grattoir pour corriger les éventuelles erreurs (manuscrit 59, manuscrit 900). L’original à recopier, parfois prêté par une autre abbaye, est privé de sa reliure. Les cahiers sont partagés entre les copistes. Mais ils peuvent aussi travailler sous la dictée. Ce travail de copie est placé sous l’autorité et le contrôle d’un chef d’atelier qui est aussi bibliothécaire, l’armarius, ainsi nommé car il détient les clefs de l’armoire où sont rangés les rares et précieux ouvrages. Délicate fonction puisqu’il doit prévoir et planifier la réalisation collective d’un manuscrit à partir de feuilles distinctes, réunies ensuite en cahiers avant l’étape de la reliure. Pour permettre au relieur d’assembler les cahiers dans le bon
ordre, on reporte à la fin de chacun d’eux un numéro d’ordre, la signature, ou le premier mot du cahier suivant, la réclame. Au XIIIe siècle, on commence à numéroter les feuilles des cahiers, c’est la foliotation. 

L’évolution de l’écriture

Durant le moyen-âge, la langue de l’écrit est le latin, langue des érudits et des religieux, qui bien souvent se confondent. Mais à partir du XIIe siècle, un nombre croissant de livres sont écrits en langues nationales en usage dans la population (français, occitan, allemand).

La graphie aussi évolue durant cette longue période. Du IIIe au VIIIe siècles dominent l'onciale et la semi-onciale, héritées de l'antiquité romaine. Les textes sont écrits de façon continue, marquée par l'absence presque totale d'espace entre les mots et de signe de ponctuation. De rares majuscules, quelquefois en rouge, rythment le texte. La lecture difficile se fait le plus souvent à haute voix. Ainsi, le plus ancien manuscrit de la bibliothèque de Troyes daté du VIIe siècle comporte seulement quelques lignes de couleur rouge, les rubriques (manuscrit 504). Le règne de Charlemagne est marqué par la renaissance de l’art et de la culture. Une nouvelle écriture, la caroline est le résultat d’une recherche de lisibilité, d’uniformité dans l’Empire et d’économie du parchemin (manuscrit 960). Elle est à l’origine des écritures dites gothiques qui se diffusent en Occident à partir du XIIe siècle. L'écriture gothique « textura » formée de lettres longues et verticales d'une grande régularité, est réservée aux manuscrits liturgiques L'écriture gothique « rotunda » aux lettres plus arrondies se trouve dans les manuscrits scientifiques, juridiques et théologiques. Afin de réduire l’espace et le temps de copie, les moines utilisent de nombreuses abréviations. La page de titre n’existe pas. Le texte commence en haut du premier feuillet par une formule en latin « incipit » traduisible par « ici commence », écrite à l’encre de couleur. Dès le XIIe siècle apparaissent les colophons (du grec « achèvement » ) qui donnent des précisions sur le titre et l’auteur du livre, le nom du destinataire, la date, le lieu et le nom du copiste.