Le billet du club des lecteurs audio

Sur les chemins noirs / Sylvain Tesson

Editeur : Ecoutez lire, Gallimard (mars 2017)

Interprétation : Grégori Baquet


Une fois n’est pas coutume, reproduisons pour commencer l’avis d’une fidèle et grande amoureuse de la littérature. 
« Après son accident, l’auteur – diminué et blessé – entreprend une randonnée en évitant les itinéraires balisés. Traverser la France des Alpes-Maritimes à la Manche. Cette   marche est appréhendée comme un exercice salutaire. Un récit bien écrit et riche en descriptions… (une lecture très intellectuelle pour ma part). Un témoignage essentiel sur l’évolution du paysage français. Une invitation à prendre son sac à dos.  » 3/5 (Nelly) 

Une force, un dynamisme à toute épreuve ressortent de cette lecture : quoi qu’il arrive l’auteur se relève pour se mettre en marche. On peut tout à fait attribuer à cet ouvrage des vertus thérapeutiques. 
Au passage, le livre met en lumière les à-côtés du paysage français, marqué, défiguré peut-être,  par l’aménagement du territoire, la décentralisation, les efforts bureaucratiques de rationnalisation. 
Les détracteurs du groupe regrettent un large éventail de thématiques abordées un peu trop rapidement. Mais ces incises reflètent plutôt l’ardeur, la passion de vivre, la flamme de la plume de Sylvain Tesson. Ce journal est un récit bien plus qu’un roman d’aventures. 
Voici un géographe, sans doute à l’esprit rebelle, qui veut vivre et s’émerveiller de l’immensité du monde. Il sait prendre son temps, un peu comme Dans les forêts de Sibérie (adapté au cinéma par Safy Nebbou en 2016). En même temps, et malgré les intempéries, les crises d’épilepsie, la peur qu’on ressent chez sa soeur, l’incertitude sur son état général après un an d’hôpital, il engloutit les kilomètres avec la rage, le désir chevillé au corps d’aller jusqu’au bout de cette diagonale salvatrice. Par dessus tout il avance, il se retape, il repart vers la lumière. 
« Voilà longtemps que je ne m’étais pas trouvé exactement tel que je le désirais : en mouvement. Je jouissais de me tenir debout dans la campagne et d’avancer sur ces chemins choisis. Noirs, lumineux, éclaircis. C’était la noble leçon de Mme Blixen devant le paysage de sa ferme africaine : Je suis bien là, où je me dois d’être. C’était la question cruciale de la vie. La plus simple et la plus négligée ».

Sylvain Tesson est aussi un chercheur d’aventures. Son opus récent à moto en est un parfait indicateur. cf. : En avant, calme et fou, Albin Michel, 2017 (avec Thomas Goisque, photographe, partenaire aussi de Sylvain sur les chemins noirs)
Pour l’audio-lecteur non-voyant que je suis, c’est un très beau visage qui se cache derrière cette gueule cassée. 

note : 3,2 / 5 (7 votes)

Terminons par un mot de l’interprète, grand homme de scène, sur sa définition du bonheur (extrait d’une conversation donnée sur www.unepetitepieceSVP.com) : « Je pense que c’est d’être conscient de ce qui t’arrive, au moment où ça arrive. Quand tu commences à être dans l’instant présent, vraiment, t’es heureux tout le temps. C’est ce qui importe le plus, parce que nous autres, êtres humains, on a tous des casseroles, on vit toujours avec ce que nos parents nous ont légué, avec le passé, et on passe notre temps à se projeter dans ce qu’on voudrait être. Donc on est malheureux, parce qu’on n’est pas encore ce qu’on voudrait être. Alors qu’il suffit de se concentrer sur ce qu’on est en train de faire maintenant, c’est à dire de discuter comme on le fait et on est heureux. Pas besoin de s’en dire plus. Carpe Diem, le reste ce n’est pas de notre ressort. Le bonheur tu ne le vois pas, tu le vois que quand tu as eu du malheur. « 

Bertrand. Qui a pris un grand plaisir à animer le Club pendant 7 ans !